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le Blog'notes de Charlot du 13

 

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Charlot du 13

 

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Chouchou, le vieux chêne
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L'Algérie de Jacky
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Temps calme

 

Il commençait à faire chaud en cette belle journée d'août, à 8 heures du matin. Et c'était un grand jour. Le 25ème anniversaire de leur mariage. Aussi, Yoshirô avait décidé d'arriver en retard à son travail. En tant que rédacteur en chef du grand quotidien de l'île de Honshū, la plus grande île japonaise, il était libre de ses horaires. Mobilisé, il avait joué de ses relations pour être affecté au service de l'information et était resté ainsi au poste de rédacteur en chef mais aussi Officier de la propagande.

Il s'était réveillé tôt ce matin-là, et après ses ablutions, il avait revêtu son kimono de yoga et avait fait ses exercices, dans le beau jardin devant la maison. Il avait assisté au lever du soleil, l'avait salué comme il se doit, et maintenant, revêtu de son magnifique kimono d'apparat, jaune pâle, il était assis en seiza sur le tatami.

En face de lui, sa femme, Takara, procédait à la préparation du thé. Ils avaient décidé, n'étant que deux, de suivre la cérémonie abrégée. Et puis, il devait bien aller au travail ensuite. Il ne pensait pas à l'uniforme d'été, en laine légère mais rugueuse, une sorte d'armoisin, qu'il devra porter la journée. Pour l'instant, il était à l'aise dans son kimono de soie et son éducation zen lui avait appris à savourer l'instant présent.

À propos d'instant présent, ses yeux se portèrent sur Takara. Sa femme était encore très belle pour son âge. De minuscules ridules en forme de patte d'oie ornaient ses yeux et seule une ride profonde et verticale zébrait son front. Cette ride était apparue le jour où ils avaient reçu le télégramme annonçant la mort de leur unique fils, leur trésor. Pilote d'un avion de chasse, un zéro, il avait été nommé parmi les premiers kamikazes et s'était écrasé contre un porte avion américain.

Yoshirô secoua la tête pour chasser ces pensées et se consacrer à la contemplation des gestes de Takara. Elle plaçait un bol à thé, le fouet, l'écope à thé, le chakin et la natsume sur un plateau en forme de col de montagne. Ce plateau n'était pas en bois comme une certaine tradition l'exigeait, mais en une fine couche de terre crue, en adobe. Dès que le thé serait prêt, elle allait tendre le bol à Yoshirô, qui le soulèverait en son honneur, le tournerait pour ne pas boire sur la face avant, boirait une seule gorgée et le tendrait à sa femme qui en ferait autant. Ensuite, elle remplirait un deuxième bol qu'ils boiraient entièrement chacun son tour.

Yoshirô aimait le calme de cette cérémonie. Les bambous plantés tout autour du jardin formaient une sorte de péristyle. Des cornouillers étaient plantés au fond, et devant, sur une petite margelle, des passiflores formaient des motifs floraux en forme d'arabesque.

Yoshirô aimait son jardin. Il aimait sa maison. Il aimait sa femme. Il n'aimait pas la mort de son fils. Il n'aimait pas la guerre. Il n'aimait pas la passivité et la faiblesse du Souverain Céleste, Hirohito, l'empereur qui s'était laissé entrainer dans une guerre inutile et dévastatrice.

Mais aujourd'hui, en ce beau jour d'été 1945, il voulait chasser la guerre de ses pensées. Aux environs de 7 heures, il y avait eu une alerte aérienne. Mais c'était simplement un avion d'observation météorologique américain qui survolait la ville.
À 7 heures 30, l'alerte avait été levée.

Yoshirô n'aimait pas cela. Pourquoi un avion d'observation météorologique survolerait sa belle ville si ce n'est pour préparer une attaque d'envergure ? Yoshirô pria pour que la journée se passe bien.

On était le 6 août 1945, il était 8 heures quinze du matin dans la belle ville d'Hiroshima.

 

 

 

Waterloo, morne plaine
sur l'air du dormeur du Val

Victor Hugo et Arthur Rimbaud,
Y en a qui ont peur de rien !

 

C'est une gentille plaine qui fleurit au printemps
Alternant anémones, bleuets et coquelicots
Une plaine ondulant au soleil éclatant
S'étalant sous un chêne où dorment des geckos.

Ici des enfants jouent, là une famille pique-nique
Un couple d'amoureux sous un petit bouleau
Sans voir que cette plaine leur fait une belle nique
Plaine, morne plaine, plaine de Waterloo.

Ils savent pourtant qu'ici furent des choses affreuses
Mais aujourd'hui que cette plaine est rieuse
Ce val est de la paix un véritable havre.

Savez-vous la raison de cette floraison ?
Ce n'est pas uniquement dû à la belle saison
Si la terre est grasse, elle l'est de cadavres.